TORONTO, le 30 sept. /CNW/ - La fin des mesures de relance gouvernementales, les réticences persistantes des consommateurs américains à dépenser et le ralentissement du marché de l'habitation au Canada feront en sorte que la croissance du PIB réel sera beaucoup moins importante que ce que prévoyaient les gouvernements fédéral et provinciaux pour 2011, peut-on lire dans un nouveau rapport de Marchés mondiaux CIBC inc.
"La perspective d'une croissance plus faible ne doit cependant entraîner aucune hésitation quant à la nécessité de commencer à resserrer la politique budgétaire", explique Avery Shenfeld, économiste en chef à la Banque CIBC. "La situation actuelle au Canada ne ressemble en rien à celle des États-Unis ou de l'Europe. Si la politique budgétaire doit être adaptée à une conjoncture plus difficile à l'étranger, il faut pour cela renoncer aux plans qui visent à la resserrer par une nouvelle augmentation des taux d'intérêt. On ne devrait remettre à plus tard le retour à la rigueur budgétaire, qui s'avère indispensable, mais qui doit être graduel, que si la Banque du Canada se retrouvait dans l'obligation de ramener les taux à zéro."
M. Shenfeld souligne que le fait qu'Ottawa devrait disposer de quelque 8 milliards de dollars de plus que prévu en recettes à la clôture de l'exercice 2010 contribuera à atténuer les difficultés liées à une croissance moins forte que prévu l'an prochain. "L'objectif de 27,6 milliards de dollars fixé en matière de déficit pour 2011-2012 pourrait s'avérer un brin ambitieux si les sources de recettes ne correspondent pas aux prévisions en raison d'une croissance faible. Cependant, la limitation des dépenses semble une stratégie judicieuse, particulièrement si, comme prévu, les provinces ont encore plus de mal à ne pas dévier de leurs plans de réduction du déficit. Il n'est tout simplement pas logique de mettre le pied sur le frein de la politique monétaire tout en prolongeant les mesures de relance."
Selon le rapport, bien que toutes les provinces aient connu un retour de la croissance en 2010 et que neuf provinces s'attendent à dépasser leurs prévisions budgétaires, l'année 2011 se présente sous un jour beaucoup plus sombre. La croissance ralentira dans toutes les provinces, à l'exception de la Saskatchewan, dont le secteur agricole a souffert des intempéries cette année. La Banque CIBC prévoit que la croissance du PIB réelle se situera à un point de pourcentage en deçà des prévisions budgétaires en 2011 et que le secteur manufacturier du Centre du Canada sera le plus durement touché.
"L'embellie a été agréable tant qu'elle a duré, mais la croissance des économies provinciales, meilleure que prévu en 2010, ralentit actuellement et devrait se poursuivre à un rythme beaucoup plus modéré en 2011", indique pour sa part Warren Lovely, stratège en matière de questions gouvernementales à la Banque CIBC. "Les conséquences seront importantes pour les personnes qui sont à la recherche d'un emploi, les entreprises et les responsables de l'élaboration des budgets gouvernementaux."
Alors que les mesures de relance budgétaire sans précédent et le processus de reconstitution des stocks touchent à leur fin aux États-Unis, la Banque CIBC prévoit que l'Ontario en ressentira le plus les effets étant donné que la province envoie encore près de 80 pour cent de ses exportations au sud de la frontière. Selon la Banque CIBC, la croissance du PIB réel ontarien en 2011 devrait être de 1,6 pour cent inférieure aux prévisions du dernier budget. Le Québec et le Manitoba, qui ont également des secteurs manufacturiers importants et axés sur les exportations, verront leur croissance tomber en deçà des prévisions, l'écart se chiffrant à 1,1 pour cent et 1,0 pour cent, respectivement.
Une fois de plus, les provinces canadiennes qui sont riches en ressources, soit la Colombie-Britannique, l'Alberta, la Saskatchewan et Terre-Neuve-et-Labrador, afficheront la plus forte croissance au pays, mais elles aussi auront du mal à respecter leurs prévisions budgétaires. La production des sables bitumineux de l'Alberta, où les investissements ont repris tout récemment, devrait croître de façon constante au cours des prochaines années. Certains risques existent cependant. L'opposition des groupes environnementaux aux États-Unis assombrit les perspectives concernant la construction de nouveaux pipelines, tandis qu'une capacité de valorisation insuffisante limitera la valeur ajoutée qui reste dans la province, en plus de la rendre vulnérable à l'écart entre les prix du brut lourd et du brut léger.
Comme les prix stagnent, les perspectives sont moins positives pour le gaz classique, mais les vastes gisements de gaz de schiste de la Colombie-Britannique représentent un fort potentiel d'avenir pour la province. L'expansion du secteur pétrolier de la Saskatchewan constitue un facteur déterminant qui, jumelé à d'autres investissements dans le secteur des ressources (à savoir la potasse), laisse présager une croissance supérieure à la moyenne. De même, partout dans l'Ouest, le transfert de technologie dans le secteur du pétrole conventionnel pourrait permettre de récupérer des réserves encore inexploitées dans les champs pétrolifères parvenus à maturité.
Les provinces dont l'économie repose sur les ressources font quand même face à certains défis. La reprise du marché du travail a été incomplète en Colombie-Britannique et en Alberta, et le taux d'emploi s'y maintient considérablement en deçà des sommets atteints avant la récession. La productivité du travail est généralement inférieure dans l'Ouest, ce qui s'explique en partie par le fait que les ressources de la région, qui ont fait l'objet d'une exploitation accélérée, n'ont pas encore produit leurs pleins dividendes. Dans le cas de la Colombie-Britannique, une taxe de vente harmonisée, qui a suscité une opposition considérable, a été adoptée dans le but de soutenir les investissements et d'ouvrir la voie à une amélioration de la productivité.
"Le secteur du logement semble également vulnérable dans l'Ouest", mentionne M. Lovely. "Certes, aucune région du Canada ne semble à l'abri d'un ralentissement plus prononcé du marché de l'habitation, lequel a perdu beaucoup de terrain tout récemment. C'est toutefois en Colombie-Britannique et en Alberta que les prix des logements ont le plus largement dépassé leur juste valeur marchande, et la correction en cours devrait émousser la vigueur de la construction résidentielle et calmer l'enthousiasme des consommateurs."
Bien que les prix des logements soient moins excessifs au Québec et dans le Canada atlantique, l'évolution de la démographie y pose un sérieux problème à long terme au chapitre de la croissance économique. Collectivement, les provinces de l'Atlantique verront leur population d'âge actif diminuer au cours des cinq prochaines années, le déclin étant le plus prononcé à Terre-Neuve-et-Labrador, selon les projections démographiques officielles de Statistique Canada. Pour l'ensemble du pays, les perspectives démographiques sont meilleures que dans la plupart des autres économies avancées, la capacité d'attirer l'immigration internationale s'avérant un facteur déterminant dans la croissance de la population, surtout au Manitoba et en Ontario.
Sans progression de la population économiquement active, les provinces canadiennes de l'Atlantique demeureront dépendantes pour leur croissance de la mise en valeur des ressources et de grands projets d'immobilisations. Cette situation est moins préoccupante à Terre-Neuve-et-Labrador où les gains dans la production des ressources et les investissements d'envergure conditionnent la croissance future. Au Nouveau-Brunswick et en Nouvelle-Écosse, la liste des grands projets d'immobilisations est relativement courte, ce qui laisse entrevoir une croissance sous la moyenne.
"En fin de compte, le contexte économique relativement solide sur lequel les gouvernements provinciaux avaient compté ne se concrétisera pas, ce qui aura pour effet de freiner les progrès réalisés dans la réduction du déficit, d'augmenter les niveaux d'endettement et de réduire la marge de manœuvre financière", ajoute M. Lovely. "Cette situation est particulièrement inquiétante en Ontario. Le fait que l'année 2010 a été meilleure que prévu n'atténuera le choc qu'en partie. À moins que des mesures correctives ne soient adoptées, les perspectives d'une croissance anémique l'an prochain risquent d'être à l'origine de tensions défavorables sur les cotes de crédit des provinces et de mettre une fois de plus les personnes qui investissent dans des instruments à taux fixe sur la défensive et les inciter à délaisser ce secteur."
Vous pouvez consulter le rapport intégral de Marchés mondiaux CIBC à : http://research.cibcwm.com/economic_public/download/ssep10.pdf.
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