La Grèce est encore en difficulté; l'entente sur le relèvement du plafond de la dette américaine doit éviter les coupes trop importantes et précipitées
TORONTO, le 28 juill. 2011 /CNW/ - Les investisseurs devraient espérer que les États-Unis approuvent un plan de relèvement de la dette américaine n'entraînant pas de réductions des dépenses ou de hausses d'impôts à court terme, peut-on lire dans un nouveau rapport de Marchés mondiaux CIBC inc.
« En ce qui a trait à l'économie des États-Unis, les investisseurs devraient en fait préférer une augmentation du plafond de la dette à un compromis d'envergure sur les mesures d'austérité si celui-ci a pour effet d'imposer d'importantes compressions des dépenses et des hausses d'impôts à court terme », explique Avery Shenfeld, économiste en chef à la Banque CIBC. « Le plus gros problème des États-Unis n'est pas de réduire le déficit, mais de relancer la croissance à un rythme auquel l'économie peut supporter une réduction du rôle du gouvernement. »
M. Shenfeld souligne que le fait de ne pas conclure une entente à long terme maintenant poussera probablement certaines agences de notation à déclasser la dette américaine, mais il ne croit pas que cela entraînera une vague de ventes de bons du Trésor. Certaines institutions en détiennent en vertu d'une politique de placement obligatoire, mais ces règles ne les obligent habituellement qu'à posséder des bons du Trésor, plutôt que des titres associés à une cote AAA, ce qui fait qu'un déclassement ne se traduira pas par de nombreuses ventes forcées.
Même déclassés, les bons du Trésor américain comporteront encore moins de risques que les obligations d'État du Japon, qui ont réussi à trouver preneurs à 1,1 % sur un horizon de 10 ans. « En réalité, un changement de cote ne ferait que dire aux marchés ce qu'ils savent déjà sur la dette des États-Unis et le statu quo à ce sujet », ajoute M. Shenfeld.
« C'est ce qui est arrivé lorsque le Canada a vu sa cote abaissée par Moody's en avril 1995. À l'époque, il n'y avait aucune évolution significative dans les tendances relatives aux écarts de taux entre les obligations à 10 ans du Canada et des États-Unis. En effet, le tournant décisif avait déjà été franchi en matière de politique budgétaire dans le budget fédéral de 1994, lequel allait, une décennie plus tard, placer le Canada largement en tête de peloton quant au niveau d'endettement. »
La situation est différente en Europe où les marchés ont applaudi l'annonce d'un deuxième plan de sauvetage de la Grèce qui élimine, dans une grande mesure, le risque d'un défaut de paiement unilatéral à court terme de la Grèce sur sa dette. Cependant, M. Shenfeld ne croit pas que l'entente européenne mettra fin une fois pour toutes au problème de la dette grecque et que, dans le meilleur des cas, elle ne fera que reporter la prochaine crise au moment où la Grèce annoncera qu'elle est incapable d'atteindre ses objectifs en matière de finances et de ventes d'actifs.
« Les dirigeants européens ont accordé à la Grèce un peu de répit en lien avec sa dette. Un peu de ce répit viendra d'une réduction en bonne et due forme de l'encours de la dette, le reste, de la valeur actualisée des économies découlant des taux inférieurs au marché sur les prêts consentis par le Fonds européen de stabilité financière et le Fonds monétaire international. En tout, nous estimons que la Grèce économisera un montant équivalent à une réduction d'environ 20 % du principal, ce qui n'est pas une panacée pour un pays dont le ratio dette/PIB frôle 150 %. »
Selon Emanuella Enenajor de la Banque CIBC, l'épineux problème budgétaire de la Grèce ne peut pas être résolu rapidement ni sans douleur. La seule solution réalisable consiste à procéder à des coupes plus profondes et difficiles afin de ramener la dette d'Athènes à un niveau plus raisonnable.
« Une autre solution, moins attrayante celle-là, serait un refus unilatéral et ponctuel d'honorer sa dette, ce qui est peu probable étant donné les éventuelles mesures de représailles de l'UE et les coûts intérieurs. Si la Grèce décidait seule de faire défaut, elle reviendrait probablement à une nouvelle drachme et profiterait d'une monnaie dévaluée pour stimuler ses exportations et renouer avec la croissance. Toutefois, comme les futurs revenus seraient comptabilisés en drachmes dépréciées, les banques et les entreprises grecques feraient également défaut sur leurs dettes libellées en euros, ce qui entraînerait des réductions de valeur dans l'ensemble des pays de la zone euro détenant des titres de créance publics et privés de la Grèce. En raison de ce risque, les dirigeants de l'UE continueront de tout en mettre en œuvre pour éviter qu'Athènes fasse défaut unilatéralement. »
L'enseignement à tirer de la situation en Grèce est que les investisseurs devront partager les conséquences négatives de tout nouveau plan de sauvetage dans la région, un risque qui incitera les investisseurs privés à réduire leurs positions en lien avec la dette périphérique de la zone euro et l'euro en général. Un ralentissement de la croissance économique causé par les mesures d'austérité de l'UE accroît également le risque d'une dépréciation de la monnaie commune.
Mme Enenajor fait remarquer que, même si le deuxième plan de sauvetage de la Grèce a permis d'apaiser les craintes au sujet d'un défaut imminent, des progrès significatifs doivent être réalisés vers l'atteinte des objectifs liés aux mesures d'austérité avant qu'un quelconque sentiment de quiétude soit justifié. « Comme les pays endettés de la zone euro sont encore aux prises avec des taux de chômage élevés et une demande intérieure faible, le moment ne pourrait être plus mal choisi pour un resserrement budgétaire. Les marchés ne tarderont peut-être pas à prendre pleinement conscience que de nouvelles réductions en bonne et due forme de la dette constituent leur seule sortie de secours, ce qui donne à penser que l'euro reculera encore et que la confiance des investisseurs continuera d'être mise à l'épreuve. »
On peut également lire dans le rapport que les dirigeants des pays européens qui n'ont pas profité d'un plan de sauvetage se sont déclarés « résolument déterminés » à ramener leur déficit à un niveau inférieur à 3 % de leur PIB. Seulement pour cette année, les compressions budgétaires ont pour effet de réduire de plus de 1 % la croissance dans la région.
Vous pouvez consulter le rapport intégral de Marchés mondiaux CIBC à l'adresse : http://research.cibcwm.com/economic_public/download/eijul11.pdf.
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Avery Shenfeld, économiste en chef, Marchés mondiaux CIBC inc., 416 594-7356, avery.shenfeld@cibc.ca; Kevin Dove, Communications et affaires publiques, 416 980-8835, kevin.dove@cibc.ca